« Il faut que je vous dise une chose : dans ma vie, j’ai été voleur, saboteur et incendiaire ».
C’est ainsi que mon grand-père de 96 ans se signala à la fin d’un repas familial il y a quelques jours. Nous étions chez mes grands-parents, dans notre Touraine. J’avais profité de quelques jours de battement entre deux employeurs pour aller leur rendre visite, tout comme mes parents, ma sœur et son fils de quelques mois, partis d’Annecy nous rejoindre sur un coup de tête. La famille presque au complet.
Né en 1923, le grand-père était adolescent quand avait commencé la guerre, et jeune homme lorsqu’elle prit fin. Une jeunesse en campagne, à Chauvigny, petit village de Poitiers dans la Vienne, où il rencontra ma grand-mère et qu’il épousa en 1946.

Raymond et Arlette, en 1946.
La guerre, dont il n’avait jamais parlé auparavant, contrairement à elle. Donc lorsqu’il prononça ces mots, enchainant sur ses anecdotes de la vie quotidienne de résistant ordinaire, l’étonnement de la tablée fut total. Notamment pour mon père, qui n’avait jamais entendu son propre père témoigner de ce passé.
Le réflexe d’enregistrer ses paroles fut immédiat. Il manque très peu de ses propos dans la captation qui suit, et la grand-mère enchaine ensuite très rapidement pour apporter ses propres souvenirs.
Un simple témoignage, qui s’adressait à nous, marqué par l’importance de la transmission d’une mémoire qui dépasse notre simple cercle familial. Pour ne pas oublier.

Soixante-dix ans de mariage plus tard, en 2016.